Chroniques

Un masque sinon rien

Le mois de juillet s’est effondré sur mes rêves d’écriture anéantissant la gymnastique quotidienne pratiquée pendant le confinement. Quatre longues semaines vivant hébété une épidémie qui ne se décide pas à en finir, portée par les discours démagogiques dont on se demande parfois s’ils ne souhaitent pas une seconde vague mortifère. Ma veille sanitaire bat son plein : j’ai ajouté tour à tout à mes tableaux de données la Nouvelle Zélande, Israël, le Luxembourg. Tableaux macabres que je contemple incrédule y cherchant une logique que personne n’a encore trouvée. Le Covid-19 possède sa propre dynamique qui rend vaines et illusoire les tentatives disparates visant à contrôler l’épidémie. Il reste le maître du jeu imposant son agenda et ses lois. Nous pouvons tenter d’avancer masqués, rien n’y fait, nous sommes à la merci de son bon vouloir.

Un article, plutôt bien écrit, de la revue National Geographic, analyse les effets de la « distanciation sociale » dans plusieurs villes américaines lors de l’épidémie de grippe espagnole de 1918. Synthèse : la distanciation sociale a été réellement efficace maintenue suffisamment longtemps sans quoi le risque de seconde vague était bien réel. Un siècle plus tard nous sommes tout aussi démunis face à un ennemi invisible venu battre en brèche nos croyances idéales de l’Homme maîtrisant la nature.

La réponse technocratique française aux envolées estivales du nombre de cas positifs de covid-19 est d’imposer le port du masque dans les lieux clos avec à la clé une amande de 135 euros pour les contrevenants . Certaines municipalités vont plus loins étendant cette obligation à certaines zones géographiques comme les remparts de Saint Malo. Le masque est devenu le nouveau sésame que l’on dégaine pour passer de la zone libre à la zone occupées. Il sort des poches, traine sous le mentons, manipulé sans cesse par des mains exempts de gel hydroalcoolique. Certains professionnels utilisent des masques semi ouverts ne protégeant pas les yeux. Dans le même temps des touristes décérébrés viennent s’aglutinner par milliers à , Quiberon ou Palavas les Flots faisant fi des distanciations sociales acquises dans l’urgence. Que se passerait-il si nous devions demain voir une recrudescence de l’épidémie ou pire émerger un nouveau virus plus virulent et moins sélectif que le Covid-19 qui tue majoritairement le 3ème âge ? 94% des décès en France touchent des personnes de plus de 60 ans.

La lecture d’un article du Figaro m’apprend que le port du masque n’est pas obligatoire en Hollande sauf dans les transports en commun : « les Pays-Bas sont l’un des derniers pays européens à encore s’opposer à la généralisation du port de masque. » Le style de l’article est symptomatique de la dérive qui touche la presse et les médias. Cette phrase en particulier, « encore s’opposer ». Qu’est-ce que c’est donc que ce pays qui ose ne pas suivre le diktat du moment ?

Les voix s’élèvent parmi les médecins et les scientifiques pour rappeler que rien ne prouve que le port généralisé du masque dans les espaces publiques extérieurs soit d’une quelconque utilité pour lutter contre la propagation d’un coronavirus. Rien n’y fait, les arrêtés pleuvent rendant nos centres villes infréquentables pour les esprits libres. J’ai choisi de vivre en accord avec mes convictions et de me promener à visage découvert quand la situation le permet c’est à dire dans des rues vides, des places désertées, des avenues abandonnées, des ruelles désolées ou des impasses sauvages. En réalité je me cache, je me terre dans mon bureau, j’arpente la ville dès potron-minet et je rentre avec la nuit. Je me sens à la fois résistant et coupable, marchant l’air d’un rôdeur en quête de larcins craignant de croiser quelques gardien de la paix en manque de bon sens ce qui s’apparente à un oxymore.

Je suis effaré par la docilité des gens que je croise. Les mesures préfectorales sont appliquées sans barguigner. La psychologie vient à notre rescousse pour nous éclairer : nous sommes capables d’adapter nos croyances face à une contrainte pour résoudre le conflit intérieur. Les personnes croisées masquées dans des rues vides tôt le matin répondent à une logique imparable : 1) J’obéis aux injonctions préfectorales 2) Je me persuade que le port du masque dans l’espace publique me protège et protège les autres 3) J’étends spontanément la contrainte partout et tout le temps puisqu’elle est nécessaire. Imparable.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *